Quand la réalité dépasse la fiction… Enquête extraordinairement addictive, malheureusement… Arrêté en Alaska, Israël Keyes est probablement, même si des zones d’ombres subsistent encore, l’un des pires meurtriers de l’histoire des Etats-Unis. Passionnant ce livre se lit comme un roman et reconstitue et l’enquête et les interrogatoires menés par la police et le FBI. Intéressant sur ce personnage qui agit tel un animal de sang froid avec une minutie d’horloger, cet « American predator » est également édifiant sur les failles de la police et du FBI, sur les aberrations d’un système fédéral dont Israël s’est joué sans vergogne et avec ironie jusque face aux enquêteurs. Attention vous ne dormirez plus tant que vous n’aurez pas terminé cette enquête.

Une main lâchée et l'enfant disparaît le temps d'un battement de cil dans un déluge de neige au cœur de l'Alaska. Quatre personnages qui vivent avec ou près de l'enfant partent à sa recherche et, pendant cette course contre la montre, déroulent le fil de leur histoire respective, livrant peu à peu les éléments qui permettent de comprendre leur présence sur cette terre hostile et d'assembler les pièces d'un sombre puzzle. Un premier roman choral parfaitement maîtrisé qui fait monter la tension tout en maintenant la température largement en dessous de zéro.

Le protagoniste principal de ce huis-clos familial, noir, très noir, est un phare, vigie de pierre érigée sur le roc, battue par les vents et les flots au large de la Norvège. Il abrite en son sein le gardien et sa famille et porte en lui leur histoire, une histoire bien sombre que le père, puis la fille et enfin la mère livreront tour à tour, chacun à sa manière dans une construction originale qui éclairera le récit à la lumière de ce qui a été dit précédemment. De la difficulté d'échapper à son destin quand on naît « là où sont les oiseaux », une terre sauvage, reculée, cernée par la mer bouillonnante. Un roman qui porte toute la beauté des éléments et la noirceur des hommes.

« Au fond de la classe je lisais l’Equipe » - Jean-Paul Belmondo. Créé en 1946 par Jacques Goddet, ce journal est l’incontournable quotidien du sport en France. Les éditions en Exergue, éditeur spécialisé dans le sport, sous la férule de Gérard Ernault revient sur les grandes heures du journal lorsque celui-ci tenait « salon » au 10, Faubourg Montmartre, adresse depuis longtemps liée à la presse, adresse désormais boudée. Une époque… et des plumes. Celle de Blondin par exemple, quand l’article de sport devient littérature ou alors peut-être l’inverse. Quand le reportage est lui-même un sport d’aventure avec les moyens de l’époque, avec les moyens du bord. Quand le sportif, personnage populaire autant qu’un acteur, citons, pour l’exemple, Gabin fidèle lecteur du journal, est fierté nationale tout en restant accessible. La beauté des échanges avec Marcel Cerdan démontre toute cette modestie. L’ouvrage, magnifique dans sa présentation et richement illustré, démontre également le rôle primordial du journal dans la création d’événement sportif, le Tour de France pour n’en citer qu’un. Un très beau cadeau teinté de nostalgie et d’amicales bourrades dans le dos…
Article In "le bruit qui court" - 12/2021

Ce texte admirable qui a remporté le prix Wepler, récompense française qui a vocation à promouvoir des "œuvres innovantes de la rentrée littéraire", livre l'histoire poignante d'un vieux syrien entre souvenirs d'un passé à la fois heureux et douloureux et réalité d'un pays à feu et à sang.

Mahmoud vit au bord du lac El-Hassad, lac artificiel qui a autrefois submergé son village. Alors que le barrage menace de céder à chaque instant sous les bombardements, chaque jour il plonge pour fuir le bruit de la guerre et pour retrouver les vestiges engloutis de sa vie passée : sa maison d'enfance, le café, les oliviers et le souvenir des siens. Et peu à peu se dessine une vie d'amour, amour pour sa famille, amour pour la littérature qu'il a enseignée. Mais cette vie, qui aurait pu être belle, sera détruite par le pouvoir, la guerre,, l'humiliation, Un roman sombre et lumineux, écrit en vers libres, une poésie bienvenue qui fait contrepoids à la violence des actes, une échappatoire à la barbarie des hommes. Un roman bouleversant.