Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

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21 novembre 2016

Léger, très léger ce roman, non pas pour les thèmes qu'il aborde, mais plutôt pour un ensemble de choses qui ne m'a pas emballé. L'écriture d'abord. Bon, d'accord, j'admets que les jeunes de treize ans ne s'expriment pas comme dans les livres, mais est-il besoin de changer l'orthographe écrite, par exemple "wikenne", pour week-end ou encore le fabuleux "J'attends qu'y z'aillent dans une banque." (p. 34) ? Personnellement, je ne pense pas qu'il faille passer par ses facilités, mais je peux me tromper. Je pourrais ajouter des incohérences, des inexactitudes, comme ce centre dans lequel est Ranko et où la classe est faite, un peu comme dans les années 40 ou 50, alors que les enfants placés sont maintenant intégrés dans les écoles classiques et non pas laissés entre eux, ou encore cette interdiction faite aux enfants de monter à l'avant d'une voiture, qui existe certes, mais jusqu'à 10 ans, hors Ranko en a 13 ! Et d'autres que je ne note pas car certaines raconteraient un peu de la fin du roman et si je ne l'ai pas aimé, ce n'est pas une raison pour le spoiler comme on dit en bon français.

Et puis, j'ajouterai que les personnages ne sont pas attachants, que je me moque un peu de leur destin, ils sont prévisibles. Tant pis.

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21 novembre 2016

Long, très long le début de ce roman. Je sais bien qu'il faut présenter les personnages et leurs occupations, les lieux qui seront ceux de l'intrigue, mais je m'ennuie, bon sang, je m'ennuie. Elle est bien gentille Marthe, mais sa vie de veuve-quincaillère entourée d'animaux et de ses deux copines ne parvient pas à me captiver. Et déjantée, puisqu'elle est présentée ainsi, elle ne l'est point. Et puis, nous avons aussi celle d'un personnage anonyme que l'on pressent bien être le tueur qui n'est pas aussi originale qu'on nous le présente. Rien de folichon, rien de rédhibitoire, juste, pour moi un ennui qui me fait fuir...

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7 novembre 2016

Pascal Garnier, décédé en 2010 a construit une œuvre littéraire discrète et savoureuse. John Banville écrivain irlandais - que je n'ai jamais lu- dit de lui que "Simenon a trouvé son véritable héritier." Eurêka, c'est exactement cela, comme Simenon, ses personnages sont des gens normaux, des sortes d'archétypes du type sympa ou pas, de la dame de compagnie dévouée, du mec cassant et imbu, de tous ceux qu'on rencontre tous les jours et sans doute de nous-mêmes aussi.

Dans cet opus, Edouard est un vieux aigri et désagréable qui s'adoucit au contact de Thérèse son infirmière. Ils se rapprochent bien que ne faisant pas partie du même monde. Jusqu'à ce qu'un événement a priori fortuit ne vienne tout remettre en cause. C'est alors l'escalade et nos personnages paisibles s'enfoncent dans une aventure peu banale. En fait en lisant ou regardant des polars, on s'aperçoit qu'il en faut peu pour basculer du mauvais côté : une soirée arrosée, un énervement, de la fatigue et un coup malencontreux ou un simple accident fait pencher la balance. Pascal Garnier provoque cet incident qui transforme notablement et durablement la vie de ses héros.

Comme à chaque fois, il nous mène pile là où il le voulait et on se laisse guider avec grand plaisir, on en redemande même. Il écrit des romans qui paraissent faciles, simples et qui par certains aspects le sont vraiment... à lire car parvenir à tant de simplicité pour un écrivain demande - j'imagine - pas mal de travail, même si : "ce qui se conçoit bien s'énonce clairement. Et les mots pour le dire arrivent aisément." comme disait Nicolas Boileau. (Eh, pas mal quand même de conclure mon billet sur une citation de Boileau, n'est-il pas ?)

Je ne saluerai jamais assez la belle initiative des éditions Zulma de rééditer les livres de Pascal Garnier tant lire cet auteur est salutaire et une excellent idée. N'hésitez pas, ces rééditions sont en poche, donc pas chères.

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7 novembre 2016

États-Unis, pendant la fameuse conquête de l'ouest, Hound dog est un jeune Indien Ojibwa qui participe à une attaque contre un convoi de blancs. Il refuse d'achever une jeune fille rousse prénommée Maggie et la ramène dans le camp. Après le rite de passage à l'âge adulte, devenu, Eagle Man, il épouse Maggie devenue Red Hair Woman qui lui offrira un sac de guerrier garnis de perles qu'elle aura elle-même confectionné. Un sac identique se retrouve en 2001 dans les mains d'une avocate pour assurer la défense de John Moon, d'origine indienne, accusé à tort de meurtre.

Ce sac offert par Red Hair Woman est la base du roman de Marc Villard, car les éditions Invenit et le musée des confluences de Lyon s'associent en demandant à des auteurs d'écrire un texte en rapport avec une œuvre exposée. Marc Villard a choisi ce sac Ojibwa datant de la fin du 19ème siècle ; six autres livres ont déjà été publiés dans cette collection, Récits d'objets.

Comme toujours Marc Villard excelle dans le court roman : il écrit une histoire complète avec des personnages bien décrits et profonds sans avoir besoin d'en faire 500 pages, mais si un jour, il écrit un pavé je le prendrais volontiers, histoire de voir ce qu'il peut ajouter. Il va au plus direct, et l'on est tout de suite dans cette tribu Ojibwa avec ses rites, ses traditions que l'on devine plus qu'on ne les lit (toujours faire confiance au lecteur).

Puis on fait un grand saut jusqu'en 2001 et John Moon accusé d'un meurtre qu'il n'a pas commis. Là encore, on comprend assez vite la situation et les personnages, ce qui les amène à agir pas toujours lucidement.

Je ne connaissais pas les éditions Invenit qui ont fait de ce petit livre un bel objet, le sac est représenté sur le rabat de la première et toutes les informations sur icelui, sur l'auteur, sur la collection Récits d'objets sont dans les pages suivantes ou sur le rabat de quatrième de couverture. Par contre, j'ai eu l'occasion cet été de visiter le musée des confluences, grâce à mon ami lyonnais Éric (qui débredine à l'occasion, voyez son blog). Nous -Madame Yv et moi-même- avons passé un après-midi entier dans ce bâtiment moderne et beau, placé tout pile à la confluence -vous voyez le lien avec le nom...?- de la Saône et du Rhône, les deux fleuve et rivière qui passent à Lyon. Très bel endroit, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, et belles collections.

Mais revenons à ce court roman écrit par un auteur que j'aime beaucoup à partir d'une belle idée et co-édité par un musée que j'ai apprécié, comment aurais-je pu l'éviter ? Et en plus, il est excellent...

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7 novembre 2016

Louis-Ferdinand Despreez est le pseudonyme d'un romancier sud-africain, engagé auprès de Nelson Mandela, qui a été aussi conseiller auprès de chefs d'état africains. c'est dire s'il connaît et maîtrise son sujet. Il écrit en français qui n'est pas sa langue natale, et c'est un vrai bonheur que de lire sa prose absolument truculente, haute en couleur, remuante et métissée. Difficile de ne pas voir dans le choix de son pseudonyme un hommage à l'autre Louis-Ferdinand de la littérature française, Céline.

Bien sûr, le parcours d'Esther est intéressant. Bien sûr les allusions à peine voilées à la Françafrique, et aux arrangements de tous les Occidentaux avec les potentats africains qui font souffrir leurs peuples mais qui laissent aux blancs, les toubabs, la jouissance de pas mal de matières premières et qui s'enrichissent en détournant l'argent censé servir aux habitants, aux magouilles qui n'ont rien à envier à celles des politiques de chez nous, tout cela est présent dans ce livre, puisque l'auteur le connaît bien qui l'a vécu de près ; il le dit d'ailleurs : "Pourtant, j'ai longtemps marché dans les clous, dit ce qu'il fallait comme il fallait quand il fallait, appelé un sourd un malentendant, dit un Black plutôt qu'un Noir, fait le tolérant compréhensif éclairé et aimable en tous lieux en respectant les innombrables encycliques de la pensée correcte. J'ai même feint d'accepter le Ramadan arriéré des uns, les mezouza superstitieuses des autres et les prétendues bénédictions Urbi et Orbi du grand chef de ceux qui ont tenté de m'élever !" (p.11) Oui, tout cela est présent, mais le plus grand bonheur de ce roman en est sa langue, un argot mâtiné d'expressions africaines, de vocabulaire vernaculaire que les sept pages finales recensent : "Blanc-raté : métis ;m> Bilongoter : jeter un sort ; Banyamulengué : étranger africain qui s'immisce dans la vie publique ; Tais-toi : billet de 10 000 CFA..."

LF Despreez est impertinent, insolent et ne respecte plus rien, il se lâche totalement. Il dit tout avec une fraîcheur de ton... j'allais dire rafraîchissante, mais j'ai craint le pléonasme. Et tout passe, l'histoire de Bokassa, des Chinois qui financent l'Afrique "à taux zéro en échange d'une indulgence au rayon des droits de l'homme des Nations Unies" (p.28).

Ce roman est pour moi un hommage à toutes ces femmes qui tentent de faire des choses pour le bien de leurs concitoyens, qui ne cherchent pas à s'enrichir et n'ont rien à faire des signes extérieurs de bien portance et de richesse. Esther est maladroite, veut aller trop vite, mais elle ne voit pas son intérêt seul. Pour finir, je citerai la fin de la quatrième de couverture qui devrait faire fléchir les derniers indécis (ne retenez que les adjectifs, vous verrez, vous ne pourrez que céder) :

"Dans une langue "de malpoli", sorte de pidgin franco-africain exubérant et imagé, Louis-Ferdinand Despreez brosse le tableau très incorrect d'une Afrique excessive en tout, indocile et braillarde. Un roman cruel, grinçant et terriblement réjouissant."