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24 septembre 2014

Pas de demi-mesure chez Lionel Shriver…

L’auteure aborde une nouvelle fois un sujet difficile et brûlant d’actualité : l’obésité et le rapport à la nourriture.
Pandora, la quarantaine entamée, n’a pas vu son grand frère -un musicien de jazz accompli- depuis quatre ans et c’est le choc lorsqu’elle le retrouve à l’aéroport : il a grossi de pas moins de 100 kilos. L’homme qui faisait craquer toutes ses copines adolescentes et pour lequel elle vouait une admiration sans bornes a le visage bouffi et le pas lent. On se retourne et on chuchote sur son passage. Elle surprend même une conversation entre deux voyageurs qui trouvent inadmissible qu’il n’ait pas payé deux sièges. Elle va apprendre qu’Edison, en plus de son poids, est ruiné, qu’il ne joue plus dans les lieux branchés des jazzmens et se voit contrainte de l’héberger pour qu’il puisse se relancer.
Son mari complique encore plus la situation : Fletcher est un aficionados de la vie saine. L’antonyme d’Edison.

Riz complet, blanc de poulet et des kilomètres de vélo. Au bout de deux mois il lance un ultimatum : Edison retourne d’où il vient ou c’est la séparation.
La suite m’a fait pousser des ho et des ha d’indignation. La méthode de Pandora pour aider son frère à maigrir m’a tout bonnement paru invraisemblable – et hyper dangereuse. Elle qui semble pourtant intelligente et rationnelle se lance dans une aventure plus bête qu’audacieuse. Et c’est seulement dans les vingt dernières pages que tout prend sens.
Dire si j’ai aimé ou pas Big Brother est un exercice compliqué. J’ai pris plaisir à suivre la vie de cette famille, j’ai aimé ses personnages complexes, jamais lisses, donc tout à fait crédibles, le rapport aux liens du sang, à l’engagement marital, à la fratrie, mais la forme qui fait que l’on comprend les enjeux à la toute fin et que finalement la majorité du roman ressemble à une fable ne m’a pas séduite. En revanche la réflexion sur le rapport à la nourriture et à la silhouette dans nos sociétés occidentales est pour le coup une réussite. Et ce même si la conclusion reste sombre, dérangeante, et laisse un goût acide qu’on aimerait faire passer avec une douceur sucrée et un peu plus d’optimisme…
On apprend dans une interview que Lionel Shriver a perdu son frère des conséquences d’obésité morbide en 2009. A la lumière de cette révélation son roman se pare d’un petit goût d’autobiographie thérapeutique et on comprend la vision ultra sombre de sa réflexion que je ne partage pas tout à fait. Lionel Shriver ne fait pas dans le demi-mesure, c’est certain. Et c’est peut être ce qui gâche un peu son propos.