Lydie B.

Conseillé par (Librairie Papeterie Aux Lettres de Mon Moulin)
28 octobre 2017

Drame collectif

Ce titre peut intriguer mais très vite, vous comprendrez que si son auteur ne voulait pas l’écrire et bien nous, nous n’aurions pas voulu le lire.
Parce que ce livre parle de l’attentat au Bataclan. Erwan Larher y a été blessé, le corps traversé par une balle alors que, comme toutes les autres personnes présentent, il n’était là que pour assister à un concert de rock. Erwan Larher est un passionné de rock, un passionné de musique, de poésie et de littérature aussi, un passionné de la vie tout simplement.
L’auteur a été longtemps hésitant sur le fait d’écrire un livre sur le Bataclan, il n'a pas voulu faire le récit d’une nuit de terreur,mais il a vu l’intérêt d’en faire un texte Littéraire, de la Littérature, comme il sait très bien le faire.
Dans ce livre, il a confronté sa destinée personnelle au drame collectif. Il y raconte bien entendu ce qui s’est passé ce soir-là, ce qu’il a enduré mais aussi ce qu’une vingtaine de ses proches ont vécu. Alors toute la bande va partager ce livre avec Erwan, partager cette expérience difficile. Erwan a écrit leur histoire à eux tous autour de lui. D’ailleurs, il l’a écrite à la 2e personne du singulier. Il dit « tu » pour nous dire que c’est le romancier qui raconte l’histoire de son double comme s’il s’agissait de quelqu’un d’autre, comme s’il se détachait de ce corps blessé au Bataclan. J’ai presque envie de dire qu’il a fait un roman de ce fait vécu, mais un roman dans lequel tout est réellement vécu ! L’auteur y a intégré les ressentis de ses proches tels qu’ils les ont couchés sur le papier sans y apporter aucune « retouche ».
Erwan Larher, c’est le rire et l’insolence. Il a pu nous le prouver dans ses cinq premiers romans particulièrement le dernier
« Marguerite n’aime pas ses fesses » une sorte de satire politique vue par la jeune génération. Dans « le livre que je ne voulais pas écrire », il nous bouleverse, nous fait pleurer, mais il a ce don aussi de nous faire rire malgré les larmes. Un grand livre.

Conseillé par (Librairie Papeterie Aux Lettres de Mon Moulin)
28 octobre 2017

un neveu très intéressé

Marcello Martini vit au Libéria où il y dirige une association humanitaire accueillant des jeunes survivants du génocide, financé un peu par le Haut-Commissariat aux réfugiés mais beaucoup par sa tante Vicky. Au moment où il apprend que le haut-commissariat aux réfugiés va effectuer un contrôle dans son école, Marcello reçoit une convocation de la vieille dame qui le menace de mettre fin à ses versements mensuels et même de le déshériter. Marcello s’accorde trois jours pour tenter de convaincre sa tante de changer d’avis.
Après vingt ans d’absence, il arrive en France pour rencontrer sa tante dans la maison de retraite où elle finit ses jours. La vieille dame est tout à fait lucide et n’a pas du tout l’intention de se laisser amadouer une nouvelle fois par son neveu. Les discussions seront vives et si au départ le lecteur est tenté de plaindre ce neveu désavoué qui nous embobine face à sa tante fortunée, il découvrira vite le côté louche du pauvre Marcello.
Vingt ans plus tôt, Marcello a été obligé de fuir la France avec des faux papiers pour ne pas être arrêté suite à un transfert de fonds illégal vers la Suisse, alors qu’un certain Walter s’est fait piégé sur dénonciation. Walter n’était autre que le directeur financier de la tante Vicky. Qui a envoyé cette lettre anonyme à la police ?
Vicky a eu le temps de mener son enquête et de se faire sa petite idée. Et ce n’est pas pour rien qu’elle a convoqué son neveu Marcello chez le notaire familial. Marcello ne l’entend pas ainsi, ses jours dépendent du bon vouloir de sa tante. Comment la convaincre de son innocence ?
Yves Ravey nous entraîne dans un drame familial drôle et acide. Il nous dévoile peu à peu la personnalité de Marcello et de Vicky. Le lecteur finit par découvrir qui est le véritable manipulateur.
Un excellent roman sur le pouvoir de l’argent et les drames familiaux qui en découlent.

Conseillé par (Librairie Papeterie Aux Lettres de Mon Moulin)
5 août 2017

Vaudeville au Nigéria

Baba Segi est un homme d’affaire Nigérian qui se targue d’avoir 7 enfants qui lui ressemblent trait pour trait
« A quoi de petits léopards peuvent-ils ressembler sinon au grand léopard » est-il fier de dire ! Ses enfants, il les a eus avec ses 3 premières épouses. Elles sont mariées avec Baba Segi depuis de nombreuses années quand arrive la 4e épouse Bolande, et avec elle, le drame s'invite dans la maison Segi ! La jeune femme est instruite, et même bien plus que cela puisqu’elle a fait des études universitaires et qu’elle est diplômée contrairement aux trois premières épouses qui sont quasiment analphabètes. Cela suffit pour que Bolande soit immédiatement rejetée par les autres, son savoir les oppose, mais pas seulement car Bolande est une jeune femme rebelle face à l’autorité, elle n’a pas l’intention de se laisser manipuler par ses 3 aînées.
Pourtant très rapidement, elle va se trouver face à un problème important, les mois passent et elle n’est toujours pas enceinte. Alors qu’au Nigéria, l’épouse doit devenir mère au plus vite pour être reconnue par la société, donc par les autres épouses !
Chaque chapitre du roman donne la parole à une des épouses qui tour à tour va comploter, manigancer ou espionner les autres, écrit dans un style pimenté, et très imagé.
Bolande est pour les 3 autres, l’intrus à éliminer, celle par qui le mal est arrivé dans la maison de Baba Segi.
C’est ce vaudeville dans le Nigéria contemporain. Lola Shoneyin y dénonce l’hypocrisie, la polygamie, et surtout la condition féminine au Nigéria, dans un texte rempli d’humour et de gravité à la fois. Très agréable à lire.
L’auteure qui vit à Lagos, cette immense mégalopole de plus de 12 millions d’habitants, souhaite transmettre un message à la jeune génération, surtout aux jeunes garçons, c’est un peu la morale de l’histoire. Elle leur conseille de
« Prendre une épouse et une seule car il est préférable d’avoir une seule source d’ennuis, c’est plus facile à gérer ! »
C’est plutôt habile de se servir d’une idée misogyne pour aider la cause des femmes.
Un talentueux roman engagé plein d’humour.

Lettre à Marion du Faoüet

Sabine Wespieser Éditeur

12,00
Conseillé par (Librairie Papeterie Aux Lettres de Mon Moulin)
5 août 2017

Mélancolie rebelle

« Chère Brigande », la lettre d’une femme engagée à une jeune rebelle que trois siècles séparent mais qu’une belle utopie, le respect de l’être humain, rapproche dans le rêve d’un monde meilleur.

Tous les romans de Michèle Lesbre sont autant de chemins vers des personnages singuliers, dans une douce mélancolie et un style lumineux et concis. Comme dans « Chemins », une scène de la vie quotidienne va déclencher chez Michèle Lesbre, un travail de mémoire tout en tissant une passerelle entre notre siècle et celui des Lumières.
De retour à Paris avec l’hiver, après un long exil volontaire, la narratrice observe dans sa rue une jeune femme installée dans le plus grand dénuement devant une ancienne boutique. Elle a le sentiment de la reconnaître et de l’avoir déjà rencontrée chez des amis lors d’une soirée d’anniversaire. Malgré son apparence de madone hors du temps à la chevelure flamboyante, les regards d’indifférence des habitants du quartier semblent l’avoir plongée dans un état de détachement désabusé. Elle refuse toute aide, quelle qu’elle soit, de sa voisine éphémère, la laissant dans un état ambigu de gêne et de culpabilité. Avec l’arrivée des journées plus clémentes du printemps, la rebelle sans-abri disparaît, ne laissant pour seule trace qu’un graffiti sur le mur « Où es-tu Marion ? ». Cette disparition soudaine et l’inscription laissée, provoque un trouble chez l’auteure qui se laisse tenter par le désir d’écrire une longue lettre à une autre Marion, brigande bretonne du XVIIIe siècle qui l’a toujours fascinée, elle qui a pour éternel refuge, cette région au bord de l’océan. Marion du Faouët était une gamine effrontée qui avait grandi à l’école de la vie. Une joyeuse voleuse aux cheveux acajou, amoureuse de la vie qui enflammait le cœur des hommes et qui comme Robin des Bois, dépouillait les riches pour redistribuer l’argent aux pauvres. La liberté était sa force.
Raconter le destin de cette insoumise, renvoie la narratrice à sa propre vie. Elle fait le parallèle avec ses engagements passés et se rappelle ses blessures peut-être jamais cicatrisées mais qui pourtant ne la feront pas renoncer à ses belles utopies de femme militante ayant le sentiment d’être devenue une étrangère dans notre monde abîmé.

( Prix France Bleu . Prix Orange 2017 )

Sabine Wespieser Éditeur

21,00
Conseillé par (Librairie Papeterie Aux Lettres de Mon Moulin)
5 août 2017

Une fascinante fresque familiale.

Louis-Philippe Dalembert nous fait découvrir un côté méconnu de l’histoire de son pays, le vote par l’Etat Haïtien en 1939 d’un décret-loi donnant l’aval à tous les consulats pour délivrer des passeports à tous les juifs qui souhaitaient se réfugier en Haïti.
Une fois cet aspect de Terre d’Accueil relaté dans le prologue, comme pour faire une mise au point, Louis-Philippe Dalembert raconte la fresque familiale des Schwarzberg, de Ruben en particulier, médecin d’origine polonaise de 97 ans qui retrouve sa petite cousine Déborah à Port-au-Prince, quelques jours après le séisme qui a dévasté Haïti le 12 janvier 2010. Déborah, jeune médecin, fait partie des humanitaires israéliens venus apporter leur aide. Déborah est née en Israël et connait finalement que peu de choses sur sa famille éclatée un peu partout dans le monde pendant la guerre. Elle attend que Ruben lui déroule petit à petit le récit des péripéties qui l’ont amené en Haïti si loin de sa Pologne natale.
Louis-Philippe Dalembert dans cet éloge à son île natale, nous entraîne avec Ruben de la Pologne à l’Allemagne. Puis à Paris, après beaucoup de difficultés, la liberté enfin retrouvée, avant de fuir encore une fois vers sa troisième patrie, Haïti qui deviendra sa Terre Refuge.
Ce tout petit pays qui a su ouvrir ses bras à de nombreux exilés alors que bien d’autres les rejeter.
Un texte qui a une résonance toute particulière avec notre actualité.