Conseils de lecture

Roman

Mélanie Richoz

Éditions Slatkine

Conseillé par (L'Autre Monde)
29 août 2016

L'extinction des dinosaures

Comme chaque lundi, Antoine tue son père. C'est une habitude dont il a besoin, car c'est un enfant atteint d'Asperger, et qu'il a besoin de repères, de rituels répétés en boucle qui le rassurent. Alors il tue son père, « pour de faux » évidemment, jusqu'à ce qu'il le tue « pour de vrai ». Une mauvaise chute, un accident bête. Son père fait le mort, mais il tombe mal, se cogne la tête, et ne se relève pas. Et c'est un monde calibré au millimètre carré qui s'écroule. Pas seulement pour Antoine, mais aussi pour sa mère.
Antoine, pendant longtemps, continue à croire – mais le croit-il vraiment ? – à un jeu auquel son père excelle particulièrement, mais se construit dans le même temps en dehors de cette figure paternelle. En parallèle, sa mère s'effondre peu à peu tout en essayant de le dissimuler, et son père assiste, impuissant dans son lit d'hôpital, à ce retournement de situation.
J'ai tué papa est, en effet, un roman à trois voix. Chacune de ces voix donne un regard différent sur le handicap, sur la particularité d'Antoine. Ce dernier essaie tant bien que mal de s'intégrer dans un monde qu'il ne comprend pas toujours, et surtout, sans cet homme, son père, qui le rassurait tant dans les moments de crise, alors que sa mère, qui sait à peine gérer son propre désarrois, ne sait plus à quel saint se vouer.
Et paradoxalement, presque prophétiquement, c'est en « tuant le père » qu'Antoine va réellement pouvoir se construire en tant que personne. Il va réussir à inverser les rôles et à se faire le pilier de sa mère quand celle-ci ne se sent plus capable de supporter le poids du chagrin, et encore moins la charge de cet enfant qu'elle a peur de ne pas savoir gérer sans son père. Il s'agit quasiment d'un roman initiatique, où Antoine va passer de l'enfance à l'âge adulte, avec cette sorte de candeur qui prête à sourire et qui le caractérise tout au long du roman, notamment dans son regard sur le drame qui touche sa famille : ce n'est pas lui qui est différent, c'est ce monde qui est fou.


Conseillé par (L'Autre Monde)
29 août 2016

Comme les larmes dans la pluie

Madel est journaliste aux Phillipines. C'est une étrangère, et elle a du mal à supporter sa stigmatisation, qu'elle partage avec son compagnon, Jan, qui, bien qu'originaire de cette région, est considéré comme un nanti. Le soir de l'anniversaire de celui-ci, un typhon est annoncé. Rien d'inhabituel pour une population déjà trop familière des caprices climatiques. Et l'excuse du mauvais temps était trop belle pour les invités qui sont tous aux abonnés absents, si ce n'est une voisine qui vient, au désespoir, confier son enfant au couple. Mais le typhon se fait de plus en plus menaçant, et en quelques heures tout bascule.
Le typhon devient tsunami, la belle maison au murs blancs, qui semblait pourtant si solide, s'écroule sous la force de l'eau destructrice. Jan est emporté par la vague, et Madel laisse glisser la main de l'enfant qui lui avait été confié malgré elle.
Au lendemain de la catastrophe, il ne reste plus qu'à compter les morts.
Anaïs Llobet, qui a elle-même vécu ce tsunami qu'elle raconte dans les Mains lâchées, réussit à équilibrer parfaitement la tension entre des moments d'émotions très intenses, où les victimes témoignent avec une justesse rare de la manière dont ils vivent les événements, et des moments de reportage, où son héroïne se fait violence pour rester professionnelle malgré le drame qui la touche personnellement. Madel n'a pas le droit d'être une victime comme les autres, pas seulement parce qu'elle est journaliste et qu'elle doit faire son « travail », mais parce qu'elle est étrangère, parce qu'aux yeux de tous les autres, elle ne pourra jamais vraiment comprendre ce que c'est de tout perdre, parce que pour tous les autres, ce n'est pas la première fois, même si c'est peut-être la pire.
Les Mains lâchées est un roman qui prend aux tripes, et qui nous rappelle aussi à quel point le drame, quand il est à l'autre bout du monde, est éphémère pour ceux qui ne le vivent pas directement, dans une société de l'immédiateté où la tragédie est mise aux enchères.


19,80
Conseillé par (Librairie L'Armitière)
27 août 2016

Quel beau personnage que cette Mathilde qui fait front à l'adversité lorsque son père tombe malade. Avec une infinie délicatesse , l'auteur nous dresse le portrait d'une famille touchée par cette maladie aujourd'hui disparue , la tuberculose. Considéré comme un paria par la société "bien pensante" de son village, le père de l’héroïne partira avec sa femme pour un exil médical sur ce grand paquebot blanc qu'est le sanatorium .
Un roman extrêmement bien documenté mais aussi et surtout d'une empathie extraordinaire avec ces personnages;
Un grand coup de cœur dans cette rentrée littéraire .


18,80
Conseillé par (Librairie Mots et Images)
27 août 2016

Belle comédie sociale autour d'un homme en perte de repères

Bertrand Berger-Laffite, grand propriétaire d'une entreprise de Cognac, se refuse à voir son nom dilué dans de vils sous-produits commerciaux. Mais à part ce choix auquel il ne veut pas déroger, tout bouge autour de lui...
Avec son écriture limpide et beaucoup d'humour, l'auteur des Singuliers continue de nous montrer qu'aussi improbable que cela puisse paraître, la beauté se retrouve en chacun d'entre nous.
Dewi Guyader


Le Cherche Midi

23,50
Conseillé par (Librairie Mots et Images)
27 août 2016

Eboulissant!

Un roman fascinant et foisonnant, évoquant aussi bien l'absurdité du système judiciaire américain que celle de notre vie contemporaine dans son ensemble.
Attention, cet Objet Littéraire Non Identifié peut être difficile à suivre : il est bourré de digressions et monologues brillants et apparemment inutiles mais qui s'avèrent pourtant donner son âme au récit.
Soyez prêts à plonger dans les raisonnements parfois abscons des protagonistes tous plus ou moins cinglés, à entrer dans un univers où l'absurde semble l'emporter inexorablement...
Un premier roman qui ne laissera personne indifférent!

Dewi