La lucarne

Seamus Heaney

Gallimard

  • Conseillé par
    22 avril 2020

    Fenêtres ouvertes sur les merveilles du monde

    Voici deux titres qui disent tout : « La lucarne » (« Seeing things ») et « L’étrange et le connu ». La lucarne, celle de la ferme familiale du comté de Derry, en Irlande du nord. Lucarne percée dans le toit de Glanmore Cottage, qui laisse entrer la lumière sous les combles :
    « Mais quand on a retiré les ardoises, un ciel
    Extravagant s’est infiltré ».
    Lucarne comme un cadre sur les êtres, les lieux et les objets de l’enfance : le lit clos, ou la fourche, ou encore le père et le fils à la pêche.
    Mais ce n’est pas une poésie paysanne, nostalgique d’un âge d’or. Ce sont des instantanés où le temps se creuse et prend une intensité, une vibration. Dans une langue fluide comme l’eau, choisie mais limpide, Seamus Heaney nous fait passer insensiblement du « connu » à « l’étrange », de la mythologie à la guerre civile irlandaise.
    Un très beau texte, « Marquages », évoque une partie de football et le rite enfantin du traçage des lignes pour délimiter le terrain : « Ces choses-là marquaient le lieu, marquaient le temps et le laissaient ouvert. » C’est ce que parvient à faire Seamus Heaney : partir d’une expérience singulière pour ouvrir tout grand le temps et l’espace. Voilà qui fait du bien.

    Frédéric